Un jeune homme, Alexandre, sans diplôme avait servi fidèlement pendant longues années son entreprise, mais les dividendes versés aux actionnaires diminuaient, si bien que les actionnaires pensaient à se débarrasser du patron de l’entreprise d’Alexandre
Le patron d’Alexandre, lui songeait à se débarrasser de ses employés et délocaliser son entreprise dans un pays à la main d’œuvre peu chère pour faire face à la concurrence; mais Alexandre, s'apercevant que le vent soufflait du mauvais côté, s'échappa et prit la route de Brême: "Là, se disait-il, je pourrai devenir rappeur de ville." Comme il avait roulé quelque temps, il rencontra sur le chemin un vieil homme en costard cravate qui tirait la langue comme un animal fatigué d'une longue course.
"Qu'as-tu donc à haleter de la sorte, camarade? T’es-tu perdu lors de ta promenade ? lui dit-il. "Ah!" répondit le vieux Monsieur, "parce que je suis d’un âge avancé, j’ai une famille que je m'affaiblis tous les jours et que je ne peux plus aller chaque jour chasser le client, mon chef a voulu me remplacer; alors j'ai pris la clef des champs; mais comment ferais-je pour gagner mon pain?" - "Eh bien!" dit Alexandre, "je vais à Brême pour m'y faire rappeur de ville, viens avec-moi et fais-toi aussi recevoir dans la musique. Je jouerai du verbe, et toi tu feras le rythme." Le vieux monsieur accepta et ils suivirent leur route ensemble. A peu de distance, ils trouvèrent une femme le long de la route et faisant une figure grise comme une pluie de trois jours.
"Qu'est-ce donc qui te chagrine, tu as bien triste mine?" lui dit Alexandre. "Elle lui répondit : "parce que j'avance dans ma carrière, que je touche misère, que mes dents sont longues et que j'aime mieux travailler que passer la serpillière et préparer la soupière , les hommes ont voulu ma peau; je me suis sauvé à temps: mais maintenant que faire, et où aller?" - "Viens avec nous à Brême; tu t'entends fort bien à la musique nocturne, tu te feras comme nous rappeurs de ville." La femme goûta l'avis et partit avec eux.
Nos vagabonds passèrent bientôt devant une cour, sur la lourde porte de laquelle était perché un écologiste au bonnet rouge qui criait du haut de sa tête. "Tu nous perces la moelle des os," dit Alexandre, "qu'as-tu donc à crier de la sorte?" - "J'ai annoncé le réchauffement climatique global," dit l’écologiste, "car c'est aujourd'hui le jour où les réservoirs de nos voitures commencent à s’assécher ; mais, comme demain on a besoin de couper la forêt pour faire du carburant, les maîtres du monde sont sans pitié pour moi; ils ont dit au média que je crachais trop de carbone, et ce soir il faudra me laisser couper le cou. Aussi crié-je de toute mon haleine, pendant que je respire encore." - "Bon!" dit Alexandre, "crête rouge que tu es, viens plutôt à Brême avec nous; tu trouveras partout mieux que la mort tout au moins: tu as une bonne voix, et, quand nous ferons de la musique ensemble, notre concert aura une excellente façon." L’écologiste au bonnet rouge trouva la proposition de son goût, et ils détalèrent tous les quatre ensemble.
Ils ne pouvaient atteindre la ville de Brême le même jour; ils arrivèrent le soir dans une cité où ils comptaient passer la nuit. Alexandre et le vieux monsieur s'établirent sur une cage d’escalier d’un immeuble en béton, abandonné, la femme et l’écologiste au bonnet rouge grimpèrent sur les marches, et même l’écologiste se percha sur la plus haute marche, où il se trouverait plus en sûreté, à l’abri des tsunamis. Avant de s'endormir, comme il promenait son regard aux quatre vents, il lui sembla qu'il voyait au dernier étage une faible lueur, il chuchota à ses compagnons qu'il devait y avoir un appartement habité, puisqu'on apercevait une clarté sous la porte. "S'il en est ainsi," dit Alexandre, "déplaçons nous à cet endroit, car cette cage sombre n'est nullement de mon goût." Le vieux monsieur ajouta: "En effet, un pot-au-feu ne me déplairait pas." Ils se dirigèrent donc vers le point d'où partait la lumière; le vieux Monsieur tenta de regarder sous la porte se qui se tramait. Alexandre, comme le plus jeune et ayant l’oreille la plus sensible, s'approcha de la porte et posa son oreille. "Qu’entends-tu là?" lui demanda l’écologiste. "Ce que j’entends?" dit Alexandre ," des messieurs à la langue bien habile, l’un se vantait comment il a pu s’acheter des beaux colliers d’or en taxant le peuple, l’autre comment il s’est acheté une belle voiture de sport grâce aux paradis fiscaux, l’autre disait qu’un harem de jeunes femmes en maillot de bain l’attendaient dans sa chambre, un autre expliquait que gagner le respect du peuple à la télévision résidait avant tout dans la gestuel et non dans le contenu , il fallait croiser les bras, en se penchant légèrement en arrière, puis d’un seul coup les bouger frénétiquement en s’approchant de la caméra, le tout en racontant des âneries, le peuple aime ca, disait-il »
- "Ce serait bien notre affaire," dit le l’écologiste au bonnet rouge. "Oui, certes!" reprit Alexandre, "ah! si nous étions là!" Ils se mirent à rêver sur le moyen à prendre pour chasser ces politiciens; enfin la femme eue la brillante idée de regarder par le trou de la serrure. Les autres voulurent l’imiter aussitôt, ils se bousculèrent. Alexandre se posa sur le dos de la femme, le vieux Monsieur s’agrippa sur les vertèbres d’Alexandre, l’écologiste au bonnet rouge s’appuya sur la tête du vieux Monsieur . La porte céda sous le poids Alexandre se mit à jurer, le vieux Monsieur à geindre, l’écologiste à se lamenter, la femme à gémir, ils tombèrent sur le seuil de l’entrée, la porte s’écrasa sur le sol en un violent fracas. Les politiciens, en entendant cet effroyable bruit, se levèrent en sursaut, ne doutant point qu'une révolution ne se prépara dans le pays, et escaladèrent les corps amassés dans l’entrée, se sauvèrent tout épouvantés de l’immeuble. Alors les quatre compagnons s'assirent à table, récupèrent se qu’ils restaient : les colliers d’or, les clefs de la voiture de sport, les jeunes femmes en maillot en bain, le manuel d’expression corporel et en profitèrent.
Quand les quatre compagnons eurent fini, ils éteignirent les lumières et cherchèrent un peu de place dans l’unique lit pour se reposer, chacun selon sa nature et sa commodité. L'Alexandre se coucha sur le sol, le vieux Monsieur sur les femmes en maillot de bain, la femme cherchant un peu de chaleur sur Alexandre, l’écologiste au bonnet rouge resta solitaire sur une chaise en bois ruminant sur le devenir du monde; et, comme ils étaient fatigués de leur longue route, ils ne tardèrent pas à s'endormir. Après minuit, quand les politiciens aperçurent de loin qu'il n'y avait plus de clarté dans leur appartement et que tout y paraissait tranquille, celui qui semblait être le président dit: "Nous n'aurions pas dû pourtant nous laisser ainsi mettre en déroute," et il ordonna à un de ses gens d'aller reconnaître ce qui se passait dans la demeure. Celui qu'il envoyait trouva tout en repos; il entra dans la cuisine et voulut allumer de la lumière; il prit donc une allumette, lorsque la pénombre s’estompa, il retrouva nez-à-nez avec la femme ambitieuse revêtue de son plus simple habit venue dans la cuisine pour se désaltérer. Mais la femme n'entendait pas raillerie; elle lui sauta au visage et l'égratigna en jurant. Saisi d'une horrible peur, l'homme courut vers la chambre pour s'enfuir; mais le vieux monsieur qui était couché tout auprès croyant que l’on voulait toucher son butin fut rempli d’une soudaine jeunesse, il s'élança sur lui et le mordit à la jambe; comme il rebroussa chemin, il trébucha sur Alexandre allongé sur le sol, et se blessa le crâne, tandis que l’écologiste au bonnet rouge, réveillé par le bruit et déjà tout alerte, debout sur sa chaise criait du haut de sa chaise: "Qu’on l’on jette dans un réacteur nucléaire" Le politicien courut à toutes jambes vers son capitaine et dit: "Il y a dans notre appartement une féministe agressive aux seins nus ; dans la chambre un vieux monsieur en robe de chambre armé d'un couteau, dont il m'a piqué la jambe; aussi se tient un jeune homme, qui m'a assommé d'un coup de batte, et en haut un militaire a proposé d’user de l’arme nucléaire « Aussi me suis-je mis en devoir de m'esquiver pour éviter l’utilisation de toute arme de destruction massive, nous avons toutes les franges de la population contre nous, nous devons fuir ce pays ." Depuis lors, ces politiciens n'osèrent plus s'aventurer dans cette partie du globe, mais que sont devenus les rappeurs de Brême ?Peut-être avez-vous vu par hasard des rappeurs avec des chaines en or, une voiture de sport, gesticulant sur un rythme endiablé, et bien sûr des femmes en maillot de bain usant habilement de leurs formes aguicheuses, peut-être avez-vous pensé qu’il s’agit des rappeurs de Brême ? Et bien, non, les rappeurs de Brême ont revendu leur trésor et investi dans des actions d’une entreprise d’armement, leurs généreux dividendes les aident à financer la production de groupes de rap à travers la planète.
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